Belle était très contrariée. Non pas parce que dans deux minutes la moitié des gardes du palais allait lui courir après mais plutôt parce qu’elle n’avait jamais été élevé pour faire face à ce genre de situations. Elle savait utiliser la bonne fourchette pour le bon plat, dire « Je suis enchantée de vous connaître » dans une trentaines de langues, elle pouvait tenir une conversation mondaine avec n’importe quel roi, et elle connaissait des tas de danses compatibles avec une robe qui touche le sol et recouvre le tiers de la piste. Durant les dernières années de son existence elle avait détesté toutes ces coutumes tellement démodées, mais elle devait reconnaître qu’a cet instant elle aurait donné n’importe quoi pour être dans un dîné mondain. Elle savait qu’elle y serait mal à l’aise, qu’elle aurait envie de s’enfuir, qu’elle s’y ennuierait terriblement et cette perspective l’enchantait follement. En fait elle aurait tout fait pour se retrouver dans une situation bien concrète, où le bon sens commun est roi, plutôt que dans un couloir à courir comme une folle pour sauver sa peau.
Bon, pensa t elle, je fais quoi maintenant ? Réfléchis
Belle, en temps normal qu’est ce que tu ferais ? Ok en temps normal
j’appellerais un serviteur et je lui gueulerais dessus jusqu’à ce que mon
problème soit réglé. Alors que ferait une personne qui n’aurait pas mon statut.
Je suppose qu’elle appellerait la police pour dénoncer le complot mais il y a
pas de police chez nous et de plus c’est Belle-mère qui dirige la garde. Crier
dans tous les sens ? Céder à la panique ? C’est tentant mais je crois
que ça ne résout rien.
« Bonjour m’zelle
- Oh, bonjour Eric, fit Belle tout en continuant son chemin. Puis elle fit brusquement demi tour. Eric !! Euh… vous n’avez pas entendu l’alerte dans les hauts parleurs tout ça tout ça ?
- Non, m’zelle, j’étais dans ma chambre j’enlevais les morceaux de verres de ma côte de maille.
- Ah… alors je suppose que vous n’êtes pas au courant. Dites moi, Eric, vous vous y connaissez pour déjouer des complots ?
- Ben moi je connais surtout le jardinage, sauf vôtre respect, et puis je nettoie les douves évidement. D’ailleurs vous auriez pas idée de tout ce qu’on retrouve la dedans.
Eric continua son monologue. Il parlait d’un ton plat et mou, quand on discutait avec lui on se prenait souvent à ne pas du tout écouter ce qu’il disait. Belle avait les yeux dans le vague, elle semblait être en train de penser à quelque chose. Puis elle revint à elle et prit une décision.
«… puis je fais le compost aussi, et c’est un gros boulot vu que le jardin est grand, alors ce que je fais des fois pour gagner du …
- Eric, coupa Belle, je vous nomme officiellement, et à titre temporaire, chef de ma garde personnel. Votre mission est de veiller à ce que je reste en vie. D’accord ?
- Ben oui d’accord, m’zelle, mais pourquoi moi ?
- Parce que quelqu’un qui nettoie régulièrement des douves infestées de crocodiles et qui peut encore compter jusqu’à dix avec ses doigts a forcément un don pour survivre !
¤
Merlin était autrefois l’alchimiste du château. Il était plutôt doué tant qu’il ne s’agissait pas de changer le plomb en or. Pour le reste il se débrouillait très bien même. En fait, il avait été licencié pour faute grave due à un excès de zèle. En bon excentrique qui se respecte, Merlin estimait normal que chaque être vivant ait le droit de s’exprimer. Aussi avait-il passé plus de la moitié de sa vie à tenter de greffer des cordes vocales sur des animaux. C’est ainsi que les cinq cents invités du roi avaient découvert, un soir de réveillon, que les recherches de Merlin avaient enfin aboutis lorsque les deux milles huîtres prévues pour le repas avaient toutes ensemble hurlées à l’aide. Il s’en était suivi un long débat avec les plaignantes qui gagnèrent le droit d’être rejetées en mer, et le repas fut déclaré végétarien.
Après cet incident, Merlin ne fut pas vraiment licencié puisqu’il n’avait jamais été payé, mais il avait retrouvé un jour toutes ses affaires dans une jolie maison au fin fond des bois.
Pour l’heure actuelle Merlin dormait sur son fauteuil à bascule, la bouche entrouverte laissant apercevoir un petit filet de bave prometteur.
Belle venait d’arriver devant la maison accompagnée par Eric. Voyant que vraisemblablement aucun tapis rouge ne serait déroulé, et qu’aucun laquais ne viendrait l’escorter elle pris les devant et entra avec fracas.
« Merliiiiiin ! Hurla-t-elle, Merlin vous êtes là ?!
- Quoi ! C’est pas moi ! J’ai rien fait ! Fit Merlin en sursautant. Il pris le temps de faire le point sur les nouveaux arrivants, puis il se ressaisit. Oh c’est vous princesse, que me vaut l’honneur de vôtre visite ?
- Ecoutez, il faut que vous nous aidiez. Belle-maman prépare un mauvais coup et d’après ma Marraine, vous êtes le seul à pouvoir l’en empêcher.
- Hmmmm, bien. De quoi s’agit-il précisément ?
- Je crois qu’elle a prévu d’envahir le pays, elle doit vouloir prendre le contrôle de notre armée.
- Pas possible… répondit Merlin distraitement.
- Moi aussi j’ai eu du mal a y croire au début, mais c’est bien vrai et il ne…
- Non, coupa Merlin, vous avez mal compris. C’est impossible qu’elle prenne le contrôle de l’armée, nous n’en avons jamais eu. Voyez-vous vôtre père n’a pas vraiment le coup pour diriger une armée. Oh, il a bien essayé, une fois ou deux, de payer des paysans pour se tenir droit et marcher au pas, mais ça ne collait pas car au bout d’un moment ils devenaient dépressifs à force de ne rien faire.
- Ben alors, comment elle va s’y prendre ?
- Connaissant votre belle-mère, elle doit avoir un plan tordu. Avez-vous remarquez un agissement suspect ces derniers temps ?
- De Belle-maman ? Mais elle est suspecte même quand elle se sert du sucre !
Belle se figea brutalement. Elle semblait avoir soudainement pris conscience d’un petit détail que son cerveau essayait désespérément de soulever.
« Maintenant qu’on en parle, fit elle alors qu’elle avait toujours les yeux dans le vague, j’ai remarqué que depuis quelques temps les serviteurs sont comme, absent. Ils sont là, mais quand ils parlent, ou marchent c’est comme si ce n’était plus vraiment eux. Et puis ils ont tous cet espèce de pin’s accroché à leur vêtement.
- Oh, fit Merlin, je crois savoir. Attendez j’ai ça quelque part.
Merlin se dirigea vers sa bibliothèque d’où il sorti un livre qui s’appelait « Mille méthodes simples, efficaces et peu coûteuses pour envahir un pays frontalier pour les nuls ». Il farfouilla dans l’index, puis trouva. Il posa le livre sur la table et dit « Voilà comment elle s’y prend !! ».
¤
Le pays voisin tant convoité par Belle-mère était autrefois une royauté. Tout comme chez Belle il y avait un château avec de hautes tours, un roi, une reine et tout l’attirail qui va avec. Le roi ne croyait pas en la monarchie, il était un fervent défenseur du droit de vote et de la démocratie. Mais il avait hérité du trône et ce n’est pas le genre de chose dont on peut se séparer aisément. Aussi avait-il commencé par essayer de semer un vent de révolte au sein de ses sujets en faisant circuler de fausses rumeurs, sans succès. Il avait alors organisé des réunions secrètes anonymes et masquées pour conspirer contre le système, sans grand succès non plus. Le problème ne venait pas du peuple mais de lui. Il était de ses rois sympathiques et pas méchants, son père n’avait pas été un tyran non plus. En fait dans la famille ils étaient tous gentils, alors le peuple ne voyait pas tellement pourquoi changer. Et puis les habitudes ont la vie dure.
Mais le roi avait sa vision moderne des choses et il comptait bien insuffler du changement que les sujets soient d’accords ou pas. Il décréta un jour que le royaume n’en était plus un, qu’il s’agissait d’une démocratie et qu’il y aurait des élections. « Tout le monde pourra se présenter, et tout le monde pourra voter, même les femmes et les enfants » avait-il déclaré. Le roi se présenta, et il eu bien du mal à trouver un adversaire. On paya alors discrètement quelqu’un pour se présenter contre lui, et le jour du scrutin le roi gagna haut la main avec plus de quatre-vingt dix-neuf pourcents des voix.
Il avait été le seul à ne pas avoir voté pour lui.
Depuis ce temps la vie dans le royaume pays n’avait pas beaucoup changé.
Le roi était devenu président, et tous les dix ans il récoltait la totalité des
voix moins un au suffrage. Il savait que ce n’était pas exactement ce qu’il
avait voulu, mais il se sentait moins coupable.
Le président avait un fils, pas très malin mais serviable, qui, à son grand désespoir, avait tenu à suivre des cours pour devenir prince charmant. Il n’avait pas tout à fait le physique mais tout le monde sait que ce n’est pas le plus important. Paul-John avait donc été envoyé dans la meilleure école de prince charmant du pays. Il y avait suivit des cours pendant quelques années et ses professeurs étaient tous unanimes : Il ferait un prince charmant de premier ordre. De mémoire on n’avait d’ailleurs jamais vu les professeurs aussi unanimes. Quoi que fasse Paul-John ses professeurs le félicitaient. S’il tombait de cheval (ce qui lui arrivait systématiquement) c’était toujours la faute de la monture, s’il faisait un hors sujet pendant un contrôle on modifiait l’énoncé, s’il se trompait sur une question de géographie et bien, on modifiait les cartes. Quand le président n’était pas là, et que les murs avaient des boules quiès on se laissait dire que de mémoire d’enseignant on n’avait jamais vu un être humain plus incompatible avec la profession de prince charmant.
Pour l’heure le président et son fils étaient en pleine discussion dans l’ancienne salle du trône.
« Mon fils, fit le président, je pense qu’il s’agit la d’un cadeau. Nous avons toujours nourri de bonnes relations avec nos voisins alors je ne vois pas où est le mal à ce qu’ils nous fassent de temps à autres des cadeaux non ?
- Oui P’pa, mais qu’est ce que c’est ?
- Et bien, vois tu mon fils, ce sont des…hmmm des décorations vestimentaires ? Et le roi a du estimer que ce sont des bijoux suffisamment nobles pour que nous les portions.
- Moi je trouve ça moche… Et en plus, ça parle quand on appuis sur un bouton.
- Bon écoutes, voilà ce qu’on va faire, moi je vais mettre un de ses machins, pour leur faire plaisir, et toi tu va aller là-bas pour les remercier de leur générosité en mon nom.
- Ui P’pa.
- Et tâches de faire honneur à notre belle démocratie, d’accord ?
- Ui P’pa.
- C’est bien, t’es gentil…
Commentaires :
Quel critique contre la socitété merveiillleuuuse ( merde, on dirait ma fukin de grand-mère là )
Je deviens accro!
Mais que va-t-il donc se passer ?
<!--[if !supportlists]-->- <!--[endif]-->Connaissant votre belle-mère, elle doit avoir un plan tordu. Avez-vous remarquez un agissement suspect ces derniers temps ?
<!--[if !supportlists]-->- <!--[endif]-->De Belle-maman ? Mais elle est suspecte même quand elle se sert du sucre !
Mdr...
Je continue ma lecture....
Chrysalide
Trop dur à supporter, le suspens ;)
Je cours (euh... clique) voir ce qui se passe après...
Chrysalide
PS ; Dis, elle le rencontre, le prince charmant, à la fin? Ptdr...
MangakaDine
Non mais en plus t'en as fait un cancre, vas y, dis tout de suite que le prince charmant n'est même pas charmant! Pffff....heureusement qu'il a un beau deuxième bout de prénom, sinon je sais vraiment pas ce qu'on pourrait en récupérer, bref.....la suite!